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Troubles Musculo-Squelettiques (TMS) du membre supérieur et pathologies nerveuses associées

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Les troubles musculo-squelettiques (TMS) regroupent différentes pathologies concernant tous les segments corporels permettant à l’homme de se déplacer et de travailler et dont la douleur d’intensité variable est l’expression commune.

Ces atteintes de l’appareil musculo-squelettique liées au travail ont des dénominations variables dans la littérature. Certaines expressions font donc référence à l’atteinte anatomique et d’autres aux facteurs de risques. Depuis les années 2000, l’acronyme TMS dans le monde francophone et WRMSD dans le monde anglophone font désormais consensus.

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Les troubles musculo-squelettiques du membre supérieur (TMS-MS) occupent une place prépondérante parmi ces troubles. Le syndrome du canal carpien représente 50% des TMS reconnus comme maladie professionnelle (MP) et les TMS des épaules connaissent une croissance plus importante que celle des TMS-MS dans leur ensemble. En très forte augmentation depuis plusieurs décennies, les TMS reconnus concernant les membres supérieurs (TMS-MS) et le dos représentaient en 2010, 85% de l’ensemble des MP.

En France, la grande majorité des TMS-MS reconnus provient du secteur secondaire puisque selon une étude de la CNAMTS, seuls 4% des TMS-MS reconnus seraient attribuables au travail informatisé.

La France n’est pas le seul pays concerné par le problème des TMS. En 2005, 35% des travailleurs de l’UE considéraient que le travail affectait leur santé. Les TMS sont les pathologies professionnelles les plus fréquentes en Europe. L‘enquête européenne de 2010 révèle que 62% des travailleurs effectuent des gestes répétitifs du membre supérieur.

 

Plusieurs phénomènes susceptibles d’expliquer cet accroissement ont été identifiés :

  • l’accroissement des contraintes de productivité et les nouvelles modalités d’organisation (globalisation, flux tendu, contrôle qualité etc…) et les conséquences sociales liées ( précarité, mutation des postes de travail, intensification du travail etc,,,)
  • L’intensification du travail, l’augmentation du travail à la chaine.
  • L’automatisation conjointe d’une partie du processus de fabrication qui augmente la repétitivité de la part de travail manuel restant avec des mouvements de faibles amplitudes effectués dans de mauvaises conditions.
  • La connaissance plus précise des pathologies du travail et l’amélioration de leur recensement NIOSH (National Institute for Occupational Safety and Health)
  • Une meilleure sensibilisation des acteurs de soins et des salariés à la problématique des TMS-MS.L’action des préventeurs légitime la réalité du risque et augmente le nombre de déclarations.
  • Les exigences accrues des salariés en matière de santé.
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Qu’est-ce qu’un trouble musculo-squelettique ?


Les TMS-MS sont des maladies multi-factorielles à composante professionnelle.

La caractérisation des facteurs de risque (FR) déterminants ces affections n’est pas simple et il convient d’abord de les considérer comme des facteurs de risques.

Ces FR ne doivent pas être abordés en termes de métier mais plutôt de contenu gestuel de la tâche et de contexte de travail.

Les troubles apparaissent lorsque les sollicitations biomécaniques sont supérieures aux capacités fonctionnelles du sujet.

 

Les FR de TMS-MS peuvent se répartir en deux grands volets.

  • Les facteurs individuels :
    Ces facteurs individuels sont liés aux caractéristiques génétiques personnelles ainsi qu’aux antécédents médicaux :
    • latéralité : les forces musculaires et l’habileté psycho-sensori-motrice sont variables entre le membre supérieur droit et gauche chez un même patient.
    • genre : les TMS-MS sont plus nombreux chez les femmes que chez les hommes. Cette différence s’explique : le secteur d’activité des hommes et des femmes est souvent différent. Les lieux de travail ainsi que les outils sont souvent créés pour les hommes et inadaptés pour les femmes.
    • âge : l’âge augmente la probabilité d’atteinte en raison d’un cumul des doses d’exposition en lien avec l’ancienneté au poste et d’une réduction des capacités fonctionnelles physiologique. Or on assiste à un vieillissement de la population salariée dans le plus grand nombre des pays industrialisés et à un allongement de la durée de vie au travail. La relation entre la durée d’exposition et le risque d’apparition de la maladie n’est pas univoque et varie selon le type de pathologie.

 

  • Les facteurs environnementaux : Ce sont les facteurs biomécaniques et les facteurs psychosociaux, eux-mêmes déterminés par l’organisation du travail et son contexte.
    • Facteurs biomécaniques :
      Dans le travail aucun FR biomécanique n’existe isolément. Ils sont associés entre eux en fonction de chaque tâche à exécuter et variable dans le temps.
      • Répétitivité des gestes : pour l’INRS la répétitivité est définie par le nombre de mouvements par minute d’une articulation. Les enquêtes européennes et nationales ont révélé une très nette augmentation dans la décennie des mouvements répétitifs des bras et des mains dans le travail (62% des salariés pendant 25% de leur temps de travail). La répétitivité est définie comme importante si le temps de cycle est inférieur à 30s ou si des actions de même type sont exercées pendant 50% du temps de travail.
      • Efforts : les efforts excessifs sont ceux qui dépassent 20% de la force maximale propre à chaque individu. Ces efforts et en particulier ceux de la préhension fragilisent les tendons et les muscles. La préhension de type pollicidigitale (pinch) est plus sollicitante que la prise globale (grasp).
      • Postures : la sollicitation d’une articulation au-delà d’une amplitude habituelle à des effets néfastes sur les éléments anatomiques indépendamment de la répétitivité et de l’effort. Des normes ont été définies et constituent des repères dont le but est de favoriser dès la conception du poste de travail la liberté posturale en éliminant les angles inconfortables ou dangereux.
      • Augmentations des sollicitations biomécaniques :
        • Le port de gants inadaptés à la taille de la main réduit la dextérité.
        • Les vibrations augmentent la charge musculaire des muscles de l’avant-bras et modifient aussi la vasomotricité locorégionale.
        • Le froid est associé à une réduction de la force maximale volontaire. Pour se protéger les opérateurs portent en plus des gants.
        • Un éclairage inadéquat peut favoriser une mauvaise posture du tronc et de la tête ou bien un hyper appui en avant sur les coudes.
        • Les améliorations dans la conception ergonomique des postes de travail et dans l’organisation du travail peuvent limiter les conséquences de ces modifications physiologiques.
    • Facteurs psychosociaux et stress :
      Dans l’enquête européenne de 2010, 56% des salariés ont déclarés être soumis à des cadences de travail élevées et 40% de stress. Les effets du stress en rapport avec les TMS-MS sont multiples : pour un même travail, l’effort est accru. Un opérateur stressé peut travailler trop vite, trop longtemps, trop intensément, sans vérifier son poste. Sa récupération fonctionnelle est allongée. De manière chronique, il amplifie la perception de la douleur et rend les opérateurs plus sensibles aux FR des TMS-MS.

Quels sont les signes cliniques de ces troubles ?


Les TMS vont de la fatigue d’un chaînon de l’appareil locomoteur à une affection caractérisée.  La fatigue posturale est réversible rapidement si l’exposition au risque cesse. Les affections bien caractérisées témoignent de l’existence d’un processus lésionnel qui nécessite obligatoirement une thérapeutique.

 

Les TMS-MS affectent, par définition, principalement les muscles, les tendons et les nerfs, c’est à dire l’ensemble des tissus mous péri-articulaires.

Tous les TMS-MS présentent des caractéristiques communes :

  • Ils résultent de l’application de contraintes biomécaniques soutenues ou répétées sur des périodes plus ou moins longues qui dépassent la capacité fonctionnelle du sujet. Il s’agit donc d’un phénomène chronique. Cependant la répétition d’un phénomène aigü peut lui donner un caractère chronique lorsque la récupération devient impossible lors des phases de repos.
  • Ils résultent de contraintes biomécaniques appliquées à des structures saines ou préalablement lésées ou déjà pathologiques.
  • Les signes cliniques sont variables mais comportent en règle une douleur intense et une gêne fonctionnelle.
  • Les sollicitations à l’origine de ces pathologies peuvent exister dans les activités professionnelles ou extraprofessionnelles.
  • Il ne s’agit pas d’un accident : une déchirure ou une rupture ne constitue pas une TMS-MS.

 

La symptomatologie varie cependant selon les tissus concernés et nous détaillerons dans cette rubrique uniquement les pathologies nerveuses. La compression du nerf est la principale contrainte. Cette compression provoque une prolifération du tissu conjonctif de l’epinèvre, entrainant une modification de la microcirculation sanguine des vasa nervorum.

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La conférence de consensus européenne de 2000 (rapport SALTSA) a proposé en 2000, une liste des différentes pathologies qui pouvaient être considérées comme des TMS-MS. En France pour l’année 2009, la majorité des MP concernaient le poignet et la main (45%) suivis par l’épaule (32%) et le coude (19%).

 

EPAULE :

Avec 32% de l’ensemble des TMS, les TMS de l’épaule représentent la deuxième cause de pathologies et ne cessent d’augmenter.

 

Plusieurs FR ont été identifiés :

  • La posture à répétition, bras levés au niveau et au-dessus des épaules.
  • L’abduction supérieure à 60° ou l’élévation antérieure dans les gestes de la main ;
  • Le maintien des bras en abduction pendant au moins 2mn consécutives sans support. L’abduction est acceptable de 20° à 60° sous conditions (norme NF EN 1005-4) et inacceptable au-delà de 60°.
  • L’adduction forcée (qui sollicite l’articulation acromio-claviculaire)
  • La réalisation de mouvements très répétitifs plus de 4 heures par jour ou avec des cycles supérieurs a 30 secondes, la manipulation de charges de plus de 4kg,
  • Le mouvement d’antepulsion/adduction est un facteur de stress du nerf supra-scapulaire et le nerf thoracique long peut être traumatisé par le port de charges lourdes et prolongées.

 

Certains syndromes canalaires de la région cervico brachiale rares peuvent être associés au TMS-MS bien que hors tableau 57 et référentiel SALTSA. Leur symptomatologie peut être responsable d’un syndrome douloureux de l’épaule ou se présenter comme une pseudo-rupture de la coiffe des rotateurs :

 

COUDE :

La proportion des affections du coude est stable de même que leur répartition au sein du tableau 57B.

L’exposition aux FR de TMS du coude est particulièrement élevée chez les ouvriers et à moindre degré chez les employés, en particulier chez les hommes. Après 50 ans, plus de 60% de cette population est exposée à au moins deux FR.

 

  • Le syndrome du tunnel radial correspond à l’expression douloureuse de la souffrance chronique de la branche profonde du nerf radial. C’est le 3e syndrome canalaire du membre supérieur par ordre de fréquence.
    L’étude des mouvements contrariés est la clé du diagnostic et en particulier celui de la supination contrariée.
    Les FR associés sont :
    • la réalisation d’efforts de plus de 1kg plus de 10 fois par heure.
    • le travail statique de la main tel que pincer ou tenir fermement un outil.
    • le travail entre 0° et 45° d’extension du coude et en particulier associé avec la posture en pronation/supination forcée de l’avant-bras.

Le traitement conservateur est proposé en première intention mais l’important recul de Raimbeau et la reprise du travail au même poste pour la presque totalité des patients permet de valider l’efficacité de la neurolyse chirurgicale par voie dorso-latérale en cas d’échec du traitement fonctionnel.

 

Les principaux FR associés sont le portage statique prolongé, la flexion/extension forcée, peut-être les outils vibrants. Un lien avec une épicondylite médiale est parfois retrouvé et il apparaît en pathologie de « deuxième ligne ».

En l’absence d’atteinte motrice il paraît légitime de privilégier le traitement médical codifié par Dellon en association avec une modification des amplitudes de flexion/extension du coude dans le cadre de la réorganisation du poste de travail.

 

POIGNET, MAIN ET DOIGTS :

La majorité des MP reconnues et indemnisées concerne le poignet, la mainet les doigts. La liste limitative des travaux susceptibles de provoquer ces maladies figure au tableau 57C.

 

  • Le syndrome du canal carpien (SCC) est le premier syndrome canalaire du membre supérieur. C’est surtout le TMS-MS le plus fréquent en France comme dans les autres pays. En 2002 le SCC constituait 37% des MP indemnisables au titre du tableau 57.
    Le programme de surveillance mis en place par l’InVS indique une prévalence clinique dans la population salariée de 4% chez les femmes et 2,4¨% chez les hommes (7,8% et 3,7% pour les plus de 50 ans), particulièrement chez les ouvriers.
    Le SCC représente 14% des pathologies du MS dans l’industrie et sa prévalence peut atteindre 6% chez les travailleurs de force.
    Les FR environnementaux retenus sont :
    • mouvements répétitifs en flexion/extension.
    • travail de force et posture maintenue.
    • mouvements de torsion du poignet.
    • utilisation de la pince pouce-index.
    • outil vibrant et clavier informatique.

 

D’autres facteurs personnels comme le tabac, le diabète et l’obésité sont soupçonnés.

La symptomatologie décrite n’a pas de particularité : paresthésies bilatérales prédominant du coté dominant, nocturnes, parfois rythmées par le travail.

Le traitement chirurgical est proposé après échec du traitement conservateur ou bien d’emblée en cas de lésions importantes prouvées par l’EMG.

Une longue évolution préopératoire, la présence d’autres TMS-MS ou un syndrome du défilé thoraco-brachial rentrant dans le cadre d’un « double crush syndrom » sont des éléments de mauvais pronostic.

 

  • Le syndrome du canal de Guyon est référencé dans le tableau 57. Il s’agit pourtant d’une pathologie rare, très peu étudiée dans le cadre des FR professionnels où seuls l’appui prolongé sur le talon de la main et la percussion sur l’éminence hypothénar peut être suspecte.

Quels sont les traitements possibles ?


L’épidémie de TMS observée depuis une trentaine d’année justifie de la valorisation de la prévention primaire de ces affections. Les principes d’une démarche de prévention sont facilement disponibles et font l’objet d’un large consensus scientifique.

 

La démarche de prévention comporte deux phases : une phase de dépistage qui conduit si c’est nécessaire à la deuxième phase dite d’intervention, inscrite dans un cadre ergonomique. Le thérapeute n’est pas directement associé à cette démarche qui concerne essentiellement un intervenant d’un organisme spécialisé et le médecin du travail.

  • La phase de dépistage incluse l’utilisation d’une check-list (OSHA, agence du ministère du travail, USA) qui prend en compte les facteurs de risque connus, l’organisation du travail et un entretien avec le médecin du travail de l’entreprise.
  • La phase d’intervention est décidée par les préventeurs. Elle se fonde sur une démarche ergonomique qui vise à transformer le travail pour maitriser le risque de TMS-MS. Cette démarche est organisée en quatre étapes dont le but est de structurer l’intervention : mobiliser, investiguer, maitriser et évaluer. La prévention primaire tente d’intervenir sur les FR au travail : diminution de la hauteur de travail, limitation des amplitudes en abduction, augmentation de la fréquence des pauses etc,.

 

Le traitement de chaque lésion n’est pas spécifique. On pourra se reporter facilement au traitement habituel de chaque pathologie. Cependant il faudra tenir compte du contexte à la fois dans les modalités thérapeutiques et dans les résultats obtenus. Ce traitement est clairement indissociable d’une prévention secondaire et d’un accompagnement par les structures dédiées.

Quel est le pronostic ?


Si la prévention primaire permet d’éviter ou de limiter les FR alors le TMS a peu de chance d’apparaitre chez le sujet exposé.

Si une pathologie se révèle en lien avec un TMS elle doit être prise en charge classiquement. Au décours l’exposition au FR doit être supprimée.

La récupération d’une pathologie clairement identifiée et correctement traitée est beaucoup toujours plus longue lorsqu’elle se manifeste dans un contexte de maladie professionnelle reconnue.

Références


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L’auteur : Docteur Patrick HOUVET

Le Docteur Patrick Houvet, chirurgien orthopédiste à Paris et en Île-de-France, est spécialiste en chirurgie orthopédique du membre supérieur, ainsi qu’en chirurgie des nerfs périphériques.