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Les lésions du nerf musculo-cutané

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Les lésions isolées du nerf musculo-cutané sont rares. Elles sont le plus souvent d’origine traumatique par lésion directe. Les lésions nerveuses peuvent être aussi indirectes et consécutives à un étirement et/ou à une compression provoqués par un mouvement forcé, répété du bras et/ou du coude, entrainant un syndrome canalaire.

branches terminales du tronc secondaire antérolatéral du plexus brachial (C5-C6, parfois C7). Il quitte le tronc du plexus brachial en regard de l’apophyse coracoïde pour se diriger en bas, en dehors et en avant. Il chemine dans le creux axillaire le long du bord latéral du nerf médian et de l’artère axillaire, puis s’en écarte pour aller perforer le muscle coracobrachial qu’il traverse entre ses faisceaux antéro-médial et postéro-latéral. Le nerf s’insinue ensuite entre le muscle brachial en arrière et le muscle long biceps en avant, pour longer le bord latéral du muscle long biceps et atteindre la gouttière bicipitale externe où il devient superficiel en prenant le nom de rameau cutané latéral de l’avant-bras.  

A ce niveau, les fibres sensitives traversent l’aponévrose brachiale pour rapidement se diviser en deux branches terminales, antérieure et postérieure, destinées à l’innervation sensitive de la face antéro-latérale de l’avant-bras, de la face dorsale du poignet et parfois de la base de l’éminence thénar. 

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 Le nerf musculo-cutané assure l’innervation motrice des muscles fléchisseurs du bras : coraco-brachial, brachial antérieur et biceps brachial.

De nombreuses variations anatomiques du NMC ont été décrites. La plus fréquente est son anastomose avec le nerf médian, retrouvée entre 15 à 40% des cas.  Ainsi une partie des fibres destinées au nerf médian peut être pris en charge par le nerf musculo-cutané et réciproquement, donnant une topographie de l’innervation motrice particulière. Le nerf peut aussi ne pas traverser le muscle coraco-brachial mais le contourner en avant ou en arrière.

Qu’est-ce qu’un syndrome canalaire du musculo-cutané ?


Les lésions par traumatisme direct du nerf musculo-cutané (section par plaie, fracture, chirurgie de l’épaule ou arthroscopie, coma) se situent très souvent au niveau du tronc initial du nerf musculo-cutané, avant sa pénétration dans le muscle coraco-brachial. Le NMC est atteint isolément ou conjointement à d’autres éléments anatomiques voisins.

Au-delà, les lésions nerveuses sont généralement indirectes et liées à une élongation ou à une compression secondaire à un traumatisme : luxation antérieure de l’épaule, fracture de l’extrémité supérieure de l’humérus, etc…

La branche terminale sensitive du nerf musculo-cutané peut être lésée à son émergence par le bord latéral de l’aponévrose du biceps, ou bien en aval dans son trajet sous-cutané.

Le NMC a trois zones fixes: sa naissance au niveau du tronc secondaire antéro-latéral, puis au niveau de sa traversée du muscle coraco-brachial, et enfin près du coude au niveau de sa perforation de l’aponévrose du biceps brachial.

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Quels sont les signes cliniques liés à une atteinte du NMC ?


Il existe deux zones différentes de syndrome canalaire du nerf musculo-cutané.

 

Syndrome canalaire de la traversée du coraco-brachial :

A ce niveau les mécanismes lésionnels du nerf peuvent être :

  • une élongation-compression du nerf, lorsque le bras est porté en abduction-rotation latérale extrême. Le nerf est étiré mais également comprimé par le bombement de la tête humérale qui le plaque contre les masses musculaires antérieures. Ce mouvement est un geste couramment répété dans de nombreux sports : tennis, volley-ball, handball, baseball… C’est aussi possible après une chirurgie en position de Trendelenburg.
  • un étirement du nerf lors de l’extension violente de l’avant-bras.
  • une compression directe du nerf provoquée par la contraction musculaire isométrique vigoureuse, prolongée ou répétée du muscle coraco-brachial. Ce mécanisme s’observe particulièrement chez les motards, les travailleurs manuels et dans les exercices de musculation répétés. Une hypertrophie musculaire du coraco-brachial, une variation anatomique du nerf dans le coraco-brachial ou la présence d’une structure aponévrotique intra-musculaire sont des facteurs prédisposants.

Ce syndrome canalaire se manifeste par des signes moteurs et sensitifs :

  • La symptomatologie sensitive s’exprime classiquement par une hypoesthésie et des dysesthésies prédominant au bord radial de l’avant-bras, n’atteignant pas le pouce contrairement au radiculopathie C6. Si un contingent de fibres du nerf médian chemine par le nerf musculo-cutané, des territoires normalement innervés par le médian sont concernés par l’atteinte du nerf musculo-cutané et peuvent rendre le diagnostic plus difficile.
  • Il existe un déficit moteur indolore de la flexion du coude (biceps et brachial antérieur), et de la supination de l’avant-bras (long biceps). Contrairement à une rupture distale du biceps, la corde du tendon du biceps est toujours palpable bien que détendue. Le reflexe bicipital est aboli alors que le reflexe styloradial reste présent. L’hypotonie-amyotrophie de la loge antérieure du bras accentue l’impression d’augmentation de volume musculaire du tiers supérieur de l’avant-bras.
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Syndrome canalaire du rameau cutané latéral de l’avant-bras :

Le mécanisme lésionnel est soit un traumatisme direct sur le nerf (sport de contact, art martiaux, portage appuyé etc…), soit un étirement provoqué par la pronation de l’avant-bras le coude en extension.

Le syndrome canalaire à ce niveau ne s’exprime que par des troubles de la sensibilité.

Le patient se plaint de douleurs, à type de « brûlures », de la région antéro-latérale du coude et d’hypo-dysesthésies du bord radial de l’avant-bras. Ces symptômes s’exacerbent quand l’avant-bras est mis en pronation complète, le coude en extension et à la palpation-pression du nerf en regard de son émergence cutanée.

La paralysie proximale isolée du NMC peut être de diagnostic difficile en particulier si la notion traumatique n’est pas prouvée. Plusieurs autres diagnostics doivent être éliminés :

  • Le syndrome radiculaire C6. Il existe des signes cervicaux habituellement avec une névralgie typique et des cervicalgies. Le reflexe styloradial est lui aussi aboli. L’hypoesthesie atteint le pouce et l’index. Outre le biceps et le brachial, le rond pronatyeur et le long supinateur sont déficitaires.
  • Lésion du plexus brachial. Le plus souvent traumatique, c’est surtout une lésion inflammatoire comme dans le syndrome de Parsonage et Turner ou l’atteinte en patchwork peut être confondue. L’évolution est le plus souvent caractéristique en trois phases, douloureuse, puis paralysante et enfin apparait l’amyotrophie. C’est dans le cas d’une mononévrite que le diagnostic est difficile.
  • Rupture isolée et incomplète du tendon terminal du biceps brachial.

Quels sont les examens complémentaires utiles ?


L’électromyogramme est l’examen clé du diagnostic. Il permet de dissocier les signes moteurs des signes sensitifs, de préciser la nature topographique de l’atteinte et d’établir un diagnostic précoce.

  • L’électrodiagnostic de détection retrouve au niveau des muscles biceps et brachial antérieur des tracés de dénervation périphérique. En dehors des muscles biceps et brachial, tous les autres muscles sont normaux.
  • L’electrodiagnostic de stimulodetection permet d’apprécier la vitesse de conduction nerveuse et sensitive du NMC. L’étude du muscle coraco-brachial permet d’évaluer le niveau lésionnel. Son atteinte témoigne d’une lésion nerveuse située au-dessus du muscle. A l’inverse, le respect du muscle coraco-brachial atteste qu’il s’agit d’une lésion à son niveau ou en aval. Anatomiquement, l’atteinte nerveuse est généralement de type neurapraxique, plus rarement de type axonotmésis.

L’échographie recherche une compression indirecte ou bien un aspect modifié du nerf.

Quel est le traitement possible ?


Le traitement des syndromes canalaires du nerf musculo-cutané est avant tout conservateur.

Le traitement médical consiste essentiellement à cesser les gestes responsables de l’étirement et de la compression du nerf : abduction-rotation latérale du bras, extension du coude et pronation de l’avant-bras, flexion du coude répétée. Rarement il est nécessaire de mettre en place une orthèse limitant l’extension du coude et/ou la rotation latérale du bras.

Dans les atteintes sévères hautes, un renforcement analytique du biceps et une éléctrothérapie excito-motrice peuvent faciliter la récupération.

Dans les atteintes distales du rameau cutané latéral, certains réalisent une infiltration au point d’émergence du nerf, sous contrôle échographique.

En cas de non amélioration clinique et électromyographique à 4 mois d’évolution on pourra proposer une exploration chirurgicale. Cette exploration doit être précédée d’un EMG précisant avec certitude le niveau lésionnel. Le nerf est neurolysé et testé par electro-stimulation préalable hors garrot. La neurolyse peut s’accompagner de la mise en place d’une protection locale par un endotube ou une barriere, s’il existe une lésion patente. Les atteintes iatrogénes, consécutives à une chirurgie de l’épaule peuvent nécessiter une exploration plus précoce.

Quelle est l’évolution de cette pathologie ?


L’évolution spontanée est généralement favorable.

Les lésions aiguës diagnostiquées tôt régressent habituellement en quelques jours après l’arrêt du phénomène compressif. La récupération est plus lente en cas de compression sévère ou ancienne.

Le délai de récupération est variable : un à trois mois environ en cas d’atteinte purement myélinique, près d’un an s’il y a eu dégénérescence wallérienne. Dans ce dernier cas, même si la récupération fonctionnelle paraît satisfaisante, des séquelles discrètes, principalement sensitives, sont notées dans la littérature dans un tiers des cas et des séquelles fonctionnelles motrices limitées dans moins de 20% des cas, avec une diminution de l’endurance des fléchisseurs du coude.

Références


  • Auzou P, Le Ber I, Ozsancak C, Ronziere T, Magnier P, Beuret-Elanquart F. et al. Paralysie tronculaires isolées du nerf musculocutané au membre supérieur. Rev Chir Orth 2000 ;86 :188-92.
  • Dailiana ZH, Roulot E, Le Viet D. Surgical treatment of compression of the lateral antebrachial cutaneous nerve. J Bone Joint Surg Br 2000;82(3):420-3.
  • Mathieu J. La paralysie isolée du nerf musculocutané, Thèse Med Lyon 1974.
  • Rieu M. Contribution à l’étude de l’anatomie ehirurgicale du nerf musculocutané au niveau de l’aisselle, Thèse Med. Lyon, 1967
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L’auteur : Docteur Patrick HOUVET

Le Docteur Patrick Houvet, chirurgien orthopédiste à Paris et en Île-de-France, est spécialiste en chirurgie orthopédique du membre supérieur, ainsi qu’en chirurgie des nerfs périphériques.