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Main plexique

Les objectifs des réparations nerveuses sont maintenant bien codifiés de manière à ne pas disperser la repousse des fibres nerveuses en favorisant la récupération d’objectifs précis et en particulier la flexion du coude puis de l’épaule.

Dans les paralysies radiculaires totales, la main a longtemps été négligée. Les éventuels muscles récupérés à l’avant-bras étaient souvent jugés non transférables car trop faibles. Et pourtant, la récupération d’une force faible va autoriser certains gestes simples dans l’usage courant de la main, qui ne nécessitent que très peu de force.

La stabilisation dynamique ou fixée du poignet, la création d’un pouce « butoir » avec parfois la récupération d’une certaine opposition et donc une néo pince pollidigitale, voire une petite mobilité en flexion-extension des doigts peuvent rendre à la main blessée une « certaine » fonction.

Qu’est-ce qu’une « main plexique » ?


Il faut différencier les problèmes à partir du tableau clinique et des lésions anatomopathologiques et on décrira donc :

  • Les lésions nerveuses supraclaviculaires au niveau des racines :
    • Les paralysies totales représentent malheureusement la majorité des cas (70-75%) avec une main totalement paralysée.
    • Les paralysies radiculaires supérieures C5-C6 ou 4 C5-C6-C7 représentent 20 à 25 % des cas et les paralysies radiculaires inférieures C8D1+/- C7 2 à 3 % avec une main partiellement paralysée.
  • Les lésions nerveuses infra et rétroclaviculaires au niveau des troncs secondaires et des branches terminales.

Les tableaux sont souvent difficiles à schématiser du fait de l’atteinte totale ou partielle d’un ou de plusieurs troncs secondaires encore que des tableaux parfaitement clairs puissent être trouvés, notamment l’atteinte isolée du tronc secondaire postérieur.

Quels sont les traitements possibles ?


Plusieurs points importants doivent être soulignés dans cette chirurgie fonctionnelle qui ne doit pas aggraver les fonctions existantes :

  • La force des muscles et leur course.
  • Il faut tenir compte de l’équilibre agoniste-antagoniste. Si par exemple, les muscles fléchisseurs sont faibles, il est possible d’équilibrer par un transfert faible pour rétablir l’extension.
  • Il faut utiliser l’effet de ténodèse physiologique, c’est-à-dire la flexion des doigts en extension du poignet et l’extension des doigts en flexion du poignet.
  • Il faut respecter la règle d’un transfert le plus direct possible et par ailleurs, si un transfert ponte plusieurs articulations, il faut que les articulations proximales soient stables par rapport à celles que l’on veut réanimer.
  • La sensibilité de la main doit être prise en compte, mais la réanimation d’une main peu sensible reste cependant utile.

 

Les lésions radiculaires supraclaviculaires :

 

  • La main tombante des atteintes C5-C6-C7 avec intégrité C8-D1 :
  • Dans les atteintes limitées à C5-C6, le problème de la main tombante ne se pose pas car les muscles radiaux (ECRL-ECRB) sont, soit présents d’emblée soit vont récupérer rapidement.
  • La chirurgie nerveuse, au niveau des racines supérieures, permet de récupérer souvent une épaule stable et une flexion du coude. Cliniquement, le tableau séquellaire est celui d’une main tombante de type paralysie radiale haute.
  • Les principaux déficits en cas de « pseudo paralysie radiale haute » portent sur :
    • L’extension du poignet : paralysie des radiaux (ECRL-ECRB) et du cubital postérieur (ECU).
    • L’extension des doigts et la rétroposition du pouce : paralysie des extenseurs communs et propres (EDC et EI) ainsi que du long extenseur et du long abducteur et court extenseur du pouce (EPL-APL-EPB).
    • La flexion des doigts ainsi que les prises pollicidigitales sont conservées, mais la pince est insensible ou peu sensible.
    • Les indications sont particulièrement fondées dans ces cas en utilisant les transferts classiques pour paralysie radiale type Merle d’Aubigné:
      • Rond pronateur (PT) sur le deuxième radial (ECRB)
      • Cubital antérieur (FCU) sur l’extenseur commun des doigt (EDC) et long extenseur du pouce (EPL)
      • Petit palmaire (PL) sur long abducteur et court extenseur du pouce (APL-EPB)
    • La technique de Boyes inclut :
      • Grand palmaire (FCR) sur radiaux (ECR)
      • FDS III-IV sur extenseurs des doigts et du pouce (ECD-EI-APL-EPD)
    • La technique choisie doit souvent être aménagée car :
      • Le rond pronateur (PT) est souvent atteint, voire paralysé et il faudra prendre un muscle non synergique et en particulier, le fléchisseur commun superficiel du 4e ou du 3e doigt (FDS) pour rétablir l’extension du poignet.
        • Le prélèvement ne doit pas se faire au doigt, comme pour une plastie d’opposition, mais au contraire, dans la paume.
        • La longueur est toujours suffisante.
        • Le trajet est direct à travers une large fenêtre de la membrane interosseuse et la suture distale se fera sur le tendon du 2e radial (ECRB) sectionné en proximal.
      • Les fléchisseurs du poignet, petit palmaire (PL) et cubital antérieur (FCU), sont en règle générale présents alors que le grand palmaire (FCR) est souvent paralysé complètement ou partiellement.
        • En ce qui concerne l’extension des doigts : si le cubital antérieur (FCU) n’est pas utilisable, il est possible de prendre un fléchisseur superficiel avec les mêmes remarques techniques que pour le transfert d’extension du poignet.
        • Il est même possible d’utiliser le fléchisseur superficiel du 3 pour l’extension du poignet et le fléchisseur superficiel du 4 pour l’extension des doigts et de faire passer les deux tendons à travers la membrane interosseuse.
      • Pour le pouce, si le petit palmaire n’est pas utilisable, il est possible de transférer le fléchisseur commun superficiel du 5 sur le long abducteur -court extenseur.
      • Si très peu de moteurs sont disponibles et si l’extension du poignet a été rétablie, une ténodèse des extenseurs communs sur la face dorsale radiale est possible en veillant à ne pas trop tendre la ténodèse pour ne pas gêner la flexion.
      • Dans certaines paralysies C5-C6-C7 avec contusion C8-D1, il est possible que ni le rond pronateur (PT), petit palmaires (FCR-PL), ne soient utilisables et seul le cubital antérieur (FCU) est alors transférable, mais cela entraine la perte de la flexion du poignet. C’est dans ces cas que l’arthrodèse du poignet se discute.

 

  • Le déficit de la flexion des doigts et de la pince pollicidigitale par lésions C8-D1 ± C7 avec intégrité de C5-C6± C7
  • La fonction de l’épaule et du coude est normale et seuls persistent au niveau du poignet, les muscles radiaux.
  • Les muscles disponibles sont les radiaux et le long supinateur. Si C7 est partiellement atteint, d’autres muscles peuvent être disponibles et les décisions seront prises « à la carte ».
  • Le but est de réanimer la flexion des doigts longs et de redonner une certaine fonction à la colonne du pouce malgré une main insensible au niveau de la pince.
    • En qui concerne la flexion des doigts longs, la plupart des auteurs utilisent le premier radial passé à travers la membrane interosseuse et transféré sur les fléchisseurs communs profonds.
      • L’extension active du poignet est indispensable pour potentialiser l’action du transfert et obtenir une bonne flexion des doigts en extension du poignet.
      • Le 2e radial (ECRB) peut être paralysé ou faible et dans ces conditions, le prélèvement du premier radial (ECRL) est formellement contre-indiqué.
      • Si le 2e radial n’est pas utilisable, la ténodèse des fléchisseurs communs profonds sur le radius est une possibilité pour obtenir une fermeture automatique des doigts lors de l’extension du poignet.
    • La réanimation de la pince dépend de l’importance de l’atteinte :
      • En cas de paralysie totale, il est possible d’améliorer la fonction par le transfert du long supinateur sur le long fléchisseur du pouce. (LFP)

 

  • La main totalement paralysée des paralysies complètes C5-C6-C7-C8-D1
  • Les racines C7-C8-D1 sont, en règle générale, avulsées et les racines C5-C6 rompues dans la région scalénique. La chirurgie nerveuse doit permettre de stabiliser l’épaule et de redonner la flexion active du coude.
  • Les blessés doivent être prévenus qu’ils conserveront un avant-bras et une main paralytique définitive.
  • Les ressources de la chirurgie sont très limitées, correction d’attitude vicieuse, ténodèse ou arthrodèse de positionnement du pouce et des doigts.

Les lésions rétro et infraclaviculaires


  • Elles représentent 25% des lésions du plexus brachial.
  • Ces lésions sont souvent associées à des lésions ostéoarticulaires de la ceinture scapulaire, (luxation de l’épaule, fracture de la clavicule, fracture de l’omoplate ou de l’extrémité supérieure de l’humérus). Les lésions vasculaires, avec rupture de l’artère axillaire ou de l’artère sous-clavière sont fréquentes.
  • Les lésions nerveuses siègent au niveau des troncs secondaires et dans 50% des cas, atteignent le tronc secondaire postérieur. Elles sont associées dans 30% des cas à des lésions du tronc secondaire antéro-externe, et notamment de la racine externe du médian et du musculo-cutané. Les atteintes du tronc secondaire antéro-interne sont beaucoup plus rares, exceptionnellement isolées et existent dans les lésions totales avec rupture de tous les troncs en règle générale associée à une rupture vasculaire.

 

  • Les lésions isolées du tronc secondaire postérieur avec récupération partielle ou sans aucune récupération :
    • Le tableau clinique est clair avec une paralysie haute de type radial incluant le triceps.
    • On utilisera les transferts classiques de type Jones-Zachary-Merle d’Aubigné.
    • Si le rond pronateur (PT) est atteint dans le cadre d’une lésion partielle du tronc secondaire antéro-externe, les fléchisseurs superficiels sont utilisables.
  • Les autres tableaux cliniques :
    • La symptomatologie déficitaire est non systématisée et donc les possibilités thérapeutiques doivent être adaptées spécifiquement.
    • Le petit palmaire ou l’extenseur propre de l’index sont souvent utilisables pour réanimer l’ouverture et la rétroposition de la colonne du pouce ;
    • Le déficit de flexion au niveau des doigts est souvent dissocié et certains fléchisseurs sont actifs alors que d’autres sont paralysés et il est alors possible d’utiliser un procédé de ténorraphie avec le tendon voisin.
    • Le déficit intrinséque doit être traité par une technique lasso de Zancolli si les flechisseurs sont disponibles ou bien par une capsulorraphie

Quel est le pronostic ?


En dehors de la main totalement paralysée, il est possible, en combinant chirurgie nerveuse et chirurgie palliative, d’améliorer la fonction de la main et d’obtenir des résultats utiles dans 65% des cas dans la littérature.

Dans la réanimation de la main tombante des lésions supraclaviculaires C5-C6-C7, les transferts classiques de type Jones-Zachary-Merle d’Aubigné donnent de bons résultats.

Dans les lésions supraclaviculaires C7-C8-D, même si le patient récupère une pince pollicidigitale active, le manque de dextérité globale l’empêche souvent de s’en servir pour les activités fines auxquelles elle est destinée dans une main normale.

Dans les lésions infra-claviculaires isolées du tronc secondaire postérieur, les transferts classiques donnent d’excellents résultats.

Dans les lésions rétroclaviculaires complexes il est très difficile de rétablir une fonction véritablement satisfaisante au niveau de la colonne du pouce et au niveau des doigts longs.

Références


  • Alnot JY, Salon A. La main plexique (l’atteinte de la main dans les lésions traumatiques du plexus brachial de l’adulte). Ann. Chir Main Vol.12 ;(5) 1993 :291-301
  • Goubier JN, Teboul F, Oberlin C. Extensor tenodesis for plexic hands with C7 to T1 or C8, T1 root avulsions : a new technique. Tech Hand Up Extrem Surg. 2006 Dec;10(4):252-4.
  • Monreal R. Dynamic tenodesis of the finger extensors to improve hand function after brachial plexus injury. Hand (N Y). 2010 Sep;5(3):256-60. 
dr patrick houvet chirurgien du membre superieur et des nerfs peripheriques a paris 16

L’auteur : Docteur Patrick HOUVET

Le Docteur Patrick Houvet, chirurgien orthopédiste à Paris et en Île-de-France, est spécialiste en chirurgie orthopédique du membre supérieur, ainsi qu’en chirurgie des nerfs périphériques.